02 - L'installation

Coralie s'efforça de se calmer pendant qu'Elis transmette les informations la concernant par radio, mais elle ne pouvait pas s'empêcher d'être un peu tendue comme si elle attendait les résultats d'un examen très important. Et en l'occurrence, c'était un peu le cas, l'examen le plus important de toute sa vie.

Elis lui rendit sa carte d'identité en la rassurant de quelques mots et un petit clin d'œil. Coralie la remercia d'un murmure avant de commencer à ramasser ses affaires, histoire de s'occuper les mains le temps que le verdict tombe.

Le temps lui sembla s'être arrêté. Était-ce bon ou mauvais signe cette attente ? Elle ne doutait pas qu'ils trouveraient son dossier, mais peut être qu'ils y avaient vu quelque chose qui leur déplaisait ? Elle s'efforça de se rappeler ce qu'elle avait pu faire qui aurait mérité de figurer de façon négative dans son dossier. Et elle n'eut pas à réfléchir bien longtemps. Avec son caractère affirmé il lui était arrivé plusieurs fois de s'accrocher avec les militaires qu'elle avait côtoyés. Elle savait que James n'avait jamais fait remonter leurs prises de bec. Ils réglaient leurs différends en privé. Mais, peut être que d'autres l'avaient fait.

Finalement la radio lâcha un laissé passé crachotant et Coralie poussa un petit soupir de soulagement en souriant plus largement à Elis.

« Merci. Ce n'est rien. Les procédures, je sais ce que c'est, j'aurais du m'y préparer. »

Elle vit un troisième homme sortir du hangar et s'approcher d'elles. Coralie en resta bouche bée.

Elle était habituée à devoir lever la tête pour regarder ses interlocuteurs. Avec son petit mètre soixante, elle était largement plus petite que toutes les personnes avec qui elle avait eu l'occasion de travailler, mais là... Elle avait l'impression que même en se dévissant les cervicales, elle n'arriverait pas en en voir le bout.

Ce type était immense... et énorme. Il aurait fait un parfait sujet d'étude dans une classe d'anatomie. Tous ses muscles étaient parfaitement dessinés sous sa peau. La professionnelle qu'elle était se demanda si en cas de besoin, il ne faudrait pas utiliser des aiguilles pour le bétail pour arriver à transpercer cette masse musculaire.

Il se présenta avant de l'inviter à le suivre. Elle obtempéra après avoir salué Elis d'un signe de tête et d'un sourire. Elle marchait à coté de lui vers la porte, observant les alentours et son guide. Elle ne put retenir un sourire en pensant à sa première rencontre avec James. Si lui avait du la charger sur son épaule comme un sac à patates, le dénommé Vaugh aurait eu encore moins de mal. Il lui aurait suffi de la prendre sous le bras comme un ballot de linge sale.

On ne pouvait pas dire qu'il était très bavard pour un guide, mais son visage était franc et son sourire avenant. Pour quelqu'un d'aussi impressionnant, il dégageait une étrange aura de bienveillance. Elle se doutait bien qu'il ne devait pas donner la même impression à tout le monde. Quand il se mettait en colère, il devait être terrifiant. Mais, à cet instant, elle se sentait à l'aise avec lui.

Il ouvrit la porte du hangar et la précéda à l'intérieur. Une fois que ses yeux se furent accoutumés au changement de luminosité elle put admirer son nouveau foyer. Ce n'était pas Byzance, mais elle avait connu pire. Il y avait au moins le nécessaire vital, même si elle savait que la promiscuité risquait de soulever quelques soucis. Les gens avaient tendance à devenir nerveux et agité quand ils étaient entassés les uns sur les autres dans des conditions stressantes.

Quand il lui fit visiter le coin « dortoir », elle comprit que ce n'était qu'une question de temps avant que les premières crises n'éclatent. Si ce n'était pas déjà arrivé.

Elle fit un pas en arrière et leva les yeux vers lui.

« Effectivement, c'est spartiate, mais j'ai connu pire. Par contre, histoire de savoir quel genre de problèmes médicaux je risque de rencontrer, vous pouvez me parler un peu de la population ? Combien de personnes accueillez-vous actuellement ? Avez-vous déjà eu des problèmes psychologiques ? Des dépressions, hallucinations, épisodes délirants ? Combien de professionnels e santé avez vous ? »

Elle s'arrêta pour reprendre son souffle et hoqueta légèrement avant de laisser échapper un petit rire.

« Excusez-moi, je crois que je me suis un peu emballée. »

Décidément, ce Vaughn plaisait beaucoup à Coralie. Même s'il avait un physique de brute et qu'il n'était visiblement pas d'un naturel bavard, il avait un sourire chaleureux et il semblait doté d'une certaine patience.

Il ne s'offusqua pas qu'elle lui ai coupé la parole et noyé sous les questions. Il prit même le temps de lui répondre patiemment. Coralie écouta ses explications avec attention. Il y avait donc deux médecins pour une trentaine de personnes. C'était déjà pas mal, enfin, si l'approvisionnement en matériel médical et médicament était suffisant. Elle ne fut pas surprise qu'il ne puisse pas lui parler des problèmes médicaux rencontrés par les réfugiés déjà présent. Elle n'aurait même pas dû poser la question, mais elle devait reconnaître qu'elle était un peu perturbée par la situation.

« Non, pour le moment, je n'ai pas d'autres questions pour l'instant. Et je vais suivre votre conseil. » répondit-elle en faisant quelques pas dans le dortoir.

Elle observa un instant la configuration des lieux avant de se diriger vers une couchette proche de l'entrée qui semblait inoccupée. Elle risquait d'avoir à bouger la nuit en fonction des urgences qu'elle aurait à gérer, autant éviter de déranger tous les dormeurs quand ça se produirait. Cet emplacement offrait l'avantage d'être facilement accessible depuis l'entrée du dortoir. Elle y laissa tomber sa vieille besace avant de rejoindre Vaughn pour la suite de la visite.